Interview Zalis: Gustavo Rodríguez Rangel, Développement International PME/ETI et Marc-Pascal Huot, Business Partner Europe de l’Est de EULEOS

 

Sachant que le coût du travail et le coût de la production ont toujours été élevés en France, comment peut-on produire du jour au lendemain tout en restant compétitif ? Quels sont les leviers sur lesquels le gouvernement pourra agir ?

Produire en France entraînera forcement une augmentation du coût de production, c’est un choix qu’il faut assumer. La compétitivité ne doit pas passer par le prix final du produit, mais par un gage de qualité et une éthique rendant un achat pertinent. Une stratégie de positionnement consisterait, par exemple, à faire valoir la qualité du « made in France » en le reliant à la création d’emplois locaux, afin d’inciter les achats responsables.  En d’autres mots, soutenir l’émergence et/ou la monté en puissance des « consomm’acteurs ».

Le gouvernement peut intervenir sur les coûts de la relocalisation, mais ne pourra pas tenir une aide sur le long terme qui serait nocive et rendrait les entreprises dépendantes.

 

La relocalisation répond à un besoin d’intégration verticale forte de l’entreprise, c’est-à-dire, ingénierie et fabrication, la France a-t-elle les moyens de le réaliser dans tous les secteurs industriels ?

Potentiellement, tous les secteurs industriels peuvent être trouvés en France (à quelques exceptions près), à condition que des investissements soient effectués dans ce sens. Mais cela ramène forcément à la question de la compétitivité. Un producteur français d’avocats n’aura jamais un rendement aussi important qu’un producteur mexicain, quoi qu’il fasse.

Cela dit, au-delà des ressources financières, la France a également les ressources humaines avec formations et compétences correspondantes lui permettant de couvrir tous les secteurs industriels.

 

Va-t-on accepter de payer plus cher les produits fabriqués en France sachant que le pouvoir d’achat de la classe moyenne reste inchangé ? Le gouvernement pourra-t-il subventionner toute la production locale ?

Même si l’origine d’un produit devient un critère de plus en plus important dans l’acte d’achat, un client choisira la plupart du temps le prix le moins cher pour deux produits strictement identiques. Pour convaincre les clients d’acheter les produits fabriqués en France, il faut mettre en avant une plus-value apportée par cette situation : meilleure qualité, un service après-vente réactif et efficace, la création d’une identité de marque, etc.

Encore une fois, il n’est pas réaliste de penser que le gouvernement pourra subventionner la production locale. Son rôle sera d’offrir aux entreprises des leviers leur permettant de devenir indépendantes suite à leur relocalisation. Et ce n’est pas le rôle de l’état que de subventionner, en tout cas dans une économie de marché, pour ne pas mentionner les règles européennes en la matière.

 

La relocalisation suppose d’avoir un niveau de compétitivité très élevé par rapport à l’Asie, la France l’a-t-elle dans tous les secteurs ? Doit-on plutôt parler de relocation européenne que de relocalisation en France ?

Dans certains secteurs, essayer d’être compétitif face à l’Asie en termes de coût de production revient à mettre des coups d’épée dans l’eau. Le reste de l’Europe, et notamment l’Europe de l’Est, permet de réduire cet écart en offrant les avantages liés à l’Union Européenne dans la plupart des pays de cette zone. Chaque entrepreneur doit mener une analyse objective sur son activité afin de déterminer si une relocalisation 100% française ne mettrait pas en péril son modèle économique. Si c’est le cas, des solutions hybrides sont à envisager.

Pour ce qui est d’une relocalisation européenne, notamment dans les pays de l’Est, l’écart qu’il pourrait subsister avec les coûts de productions en Asie pourrait être compensé par une réduction des coûts de transport et l’absence de barrières tarifaires au sein de l’UE.  Ainsi, l’analyse doit tenir compte de la chaine de commercialisation dans son intégralité, de l’acquisition des matières premières à la distribution et jusqu’au point de vente au consommateur final.

 

Comment un manager de transition peut-il aider une entreprise à se relocaliser ?

La relocalisation peut être analysée comme le revers de la médaille de l’internationalisation.  Dans les deux cas de figure, il est impératif de bien préparer le terrain avant de se lancer.  Chez EULEOS, nous accompagnons nos clients dans toutes les étapes d’un tel projet :

  • en amont : étude de marché avec leur faisabilité et leur potentiel, adéquation des produits, contrôle des droits de propriété industrielle, préparation des budgets, choix partenaires, recrutement ;
  • durant la mise en place : contrôle des processus, suivi des différentes actions et résultats, pertinence de la stratégie décidée, rapports avec partenaires ;
  • en aval : plan de développement, incidence sur la société et son fonctionnement, transmission des dossiers.

 

Les qualités qui font un bon manager de transition doivent-elles être différentes s’il s’agit d’une relocalisation ?

De la même manière qu’il existe des médecins spécialisés dans différents domaines du savoir médical, un Manager de Transition spécialisé dans la gestion de projets internationaux peut être d’une grande aide lors de la mise en œuvre d’un projet de relocalisation.  A titre d’exemple, au sein d’EULEOS nous avons une équipe internationale qui inclut des Business Partners tous multilingues, ayant déjà expérimenté cette démarche, vivant pour certains toujours à l’étranger (notamment en Europe de l’Est), et d’autres y ayant vécu pendant de longues années.  Cela permet de traiter les dossiers étrangers en direct, de manière efficace, et d’en faire la « traduction » locale (France, Europe de l’Est) plus facilement.

Enfin, grâce aux compétences complémentaires des Business Partners EULEOS, il est possible pour le Manager de Transition chargé du projet de se faire épauler sur certains aspects spécifiques, comme la logistique, les systèmes IT ou la communication, où des compétences pointues sont nécessaires pour assurer et le succès du projet et la pérennité des actions menées.